Qu’il n’aura plus jamais le temps
Un jour de plus il aurait pu chanter
Faute au destin, faute à la chance
Faute à ses cordes qui s’étaient cassées
Son chant s’appellera silence.

Né en URSS en 1938, Vladimir Vyssotski est mort à l’âge de de 42 ans, durant les Jeux Olympiques de 1980 à Moscou. Annoncées par un simple entrefilet dans la presse, ses funérailles rassembleront près d’un million de personne, soit le rassemblement populaire spontané le plus important de l’histoire de l’URSS. Le peuple crie sa douleur, pleure son poète. Hommage bouleversant pour quelqu’un qui n’a jamais vu, de son vivant un texte publié ou un CD édité.
Décrire la voix de Vladimir Vissostky est impossible. C’est une voix de baryton qui devenait grave et rocailleuse. Il avait une voix exceptionnelle, originale et reconnaissable, très troublante, très séduisante qui parlait de la douleur d’une façon formidable. C’était une voix de tragédien. Je n’ai jamais vu quelqu’un d’adulé par le public comme il l’a été. Marina Vlady
C’est que la voix de Vyssotski s’est diffusée malgré le régime soviétique. Enregistrées sur les bandes des Gründig puis échangées sous le manteau, ses chansons constituent une véritable fresque de la vie soviétique. Il y décrit la vie des voyous, des zeks, des marins et des ouvriers de tout le pays. La censure qui frappe son oeuvre poétique n’empêche pas la diffusion clandestine, pourtant Vyssotski souffre d’un manque de reconnaissance officielle. Il vit ce silence comme une humiliation, sentiment qui le pousse parfois vers ses addictions, à l’alcool et opiacés.
Notre intime désaccord avec le régime nous semblait inexprimable à vois haute, et nous n’avions pas de mots assez décents pour traduire notre malaise, notre amertume, notre protestation. Or, ces mots avérés, Vyssotski les puisant sans relâche, on aurait dit qu’il les tirait du puits insondable de la mémoire séculaire du peuple. Vadim Toumanov, ancien condamné du Goulag, dans Tu Seras Un Homme
Grâce à sa rencontre avec l’actrice Marina Vlady, qui devient sa compagne, il voyage hors d’URSS en Allemagne, en France puis aux Etats-Unis. Vyssotski ne cherche pas pour autant à s’installer en Occident dont il se lasse vite ; sa poésie est russe, comme son cœur.
Vyssotski n’était pas ce qu’on appelle un dissident, mais la liberté contenue dans chacune de ses chansons ne pouvait qu’être subversive dans le contexte soviétique.
Son chant, ses chansons, son œuvre ont une fonction de dénonciation. Il écrivait sa poésie pour en faire une peinture de son temps, de son siècle et de son peuple. Pour exprimer les problèmes et les crier. On peut regarder l’ensemble de son oeuvre ; qui compte pas moins de 800 chansons ; comme une fresque sociale, comme une encyclopédie de la vie soviétique. Yves Gauthier
- Avec Marina Vlady, actrice et romancière, Yves Gauthier, traducteur ; Mihail Chemiakine, artiste ; Pierre Léon, réalisateur ; Konstantin Kazanski, arrangeur musical.