Synopsis
Critique
Par Pierre Murat
En URSS, tout cinéaste devait réaliser un film sur les ravages de la Seconde Guerre mondiale. Il y en avait de magnifiques : L’Arc-en-ciel, de Mark Donskoï, ou Quand passent les cigognes, de Mikhaïl Kalatozov. Celui du jeune Tarkovski s’en éloigne. Pas par le lyrisme : comme ses confrères, le cinéaste débutant célèbre – en plans sublimes ! – la terre russe, accueillante, maternelle. Mais on ne trouve pas, chez lui, la moindre trace de « héros positif », auquel se condamnent tous les réalisateurs qui veulent vivre en paix avec le pouvoir. C’est en espionnant pour les siens que le petit Ivan est devenu cette machine à tuer : visage d’ange et coeur de pierre. Tarkovski le filme comme une caricature d’adulte, drogué à la violence et à la haine. Tous deviennent responsables de son état : l’ennemi invisible et omniprésent, mais aussi les Russes, qui ne se sont pas rendu compte du mal qu’ils lui faisaient…
Cette vision iconoclaste attira l’attention des professionnels étrangers (Lion d’or du premier film à Venise), mais aussi celle des bureaucrates soviétiques, qui n’auront de cesse de brimer le cinéaste jusqu’à son exil en Italie, des années plus tard. Aussi beau qu’il soit (plus sensuel que d’habitude, aussi), ce film reste mineur si l’on songe aux chefs-d’oeuvre que le cinéaste réalisera plus tard : Andreï Roublev, Stalker ou Le Sacrifice. Reste le souvenir d’un gamin aux mèches blondes qui sourit à la vie et à sa mère, avant d’être plongé, par bêtise, dans l’horreur absolue.
Source : http://www.telerama.fr/cinema/films/l-enfance-d-ivan,6399.php